par Jacqueline et Raoul Dubois
Anne Pierjean avait suivi dans l’édition pour la jeunesse pendant de longues années un parcours original et un peu atypique comme le soulignait Marc Soriano dans son Guide de Littérature pour la Jeunesse. Il plaisait à souligner dans ses ouvrages une authenticité, un réalisme poétique du quotidien et nous ne pouvons que le suivre dans cette analyse.
Parler d’un de ses livres, c’était le point de départ d’une correspondance soutenue où elle dévoilait volontiers ses motivations et ses doutes, ses problèmes personnels, dessinant ainsi plus qu’une silhouette d’écrivain, une personnalité riche et parfois tourmentée. Pour peu que vous entriez dans le jeu, la correspondance devenait régulière, volontiers bavarde, toujours chargé de sens et d’une véritable bonté.
Ecrire était pour elle une passion à laquelle elle se livra jusqu’à la fin de sa vie parce qu’elle ne la séparait pas de sa vie.
Mais ce qui l’a marquée avec force ce sont les rencontres des lecteurs. Elle acceptait parfois, au risque de sa santé, de rencontrer des classes. Après ces passages, toujours trop brefs, les échanges de courrier continuaient, collectifs ou individuels. Elle a ainsi lié de véritable amitiés dont ses lettres renvoyaient des échos. Elle a aussi suscité de nombreux travaux, fait lire et fait écrire.
Quand on assostait à ces petits évènements, on ne pouvait que s’émerveiller du contact établi. Une impression étrange, celle d’une petite fille, d’une jeune femme retrouvant ses jeunes interlocuteurs, la simplicité d’un dialogue amical.
Sa dernière lettre, peu de temps avant sa mort, était débordante de vie simple, de souci pour les autres, de joie « d’avoir été peut-être utile » comme disait Aragon.
Anne Pierjean était de ses écrivains de jeunesse dont la rencontre a justifié la confiance que nous avons mise en la littérature de jeunesse.
( article paru dans le n° 76 – mars 2003 – du bulletin du CRILJ )
Née dans la Drôme en 1921, très attachée à sa région, Mademoiselle Marie-Louise Robert s’installe à Crest où, devenue Madame Grangeon, elle a trois enfants, Jean, Pierre et Anne, dont elle fait Anne Pierjean en créant son pseudonyme. Elle enseigne vingt ans mais doit, en 1965, quitter ce travail qu’elle aime. Lauréate du Grand Prix du Salon de l’Enfance, en 1972, pour Marika (GP Spirale), elle a écrit près de quarante livres, pour les enfants d’abord, les adolescents ensuite : L’innocente (Magnard 1969), L’Ecole ronde (GP Rouge et Or Dauphine 1974), Paul et Louise (GP Grand Angle 1975, Diplome Loisirs Jeunes), Loïse en sabots (GP Grand Angle 1977, Diplome Loisirs Jeunes), Saute Caruche (GP Grand Angle 1977). « Mon choix d’écrire pour les enfants coule de source, créé par ma vie même. J’étais institutrice et le serais restée sans un accident de santé. J’ai laissé l’enseignement sans laisser les enfants. J’aimais écrire, j’ai eu le temps de le faire. »