Louis Mirman

 

 

 

 

     Louis Mirman qui, à partir de 1947, a tenu une place importante dans la littérature de jeunesse aux éditions Hachette, quand ces éditions dominaient la production tant au niveau des albums qu’à celui des livres, a disparu. Il était né en 1916.

     Entré chez l’éditeur pour s’occuper plus particulièrement des traductions de textes étrangers, professeur d’anglais à l’origine, grand admirateur de la culture anglaise, il n’a pas peu contribué à la traduction d’oeuvres anglo-saxonnes, en particulier dans la Bibliothèque Verte et la Bibliothèque Rose. Le Club des Cinq, le Clan des Sept et les Oui Oui d’Enid Blyton lui doivent une part de leur succès, ainsi que les ouvrages de Caroline Quine, la série des Alice et des Sœurs Parker.

     Comme il le reconnaissait lui-même, en 1956, dans un numéro spécial d’Enfance où il analysait bien son action, « nos gros tirages ont un revers, ils nous limitent à des valeurs sures et rendent prudentes nos expériences, qui ont un endroit car nous donnons une vraie chance aux nouveaux auteurs. »

     C’est sans doute à cette conception que nous devons la publication des ouvrages de Georges Bayard (la série des Michel), des romans de Paul-Jacques Bonzon, Les Six Compagnons, mais aussi des Fantômette de Georges Chaulet et des Langelot de Lieutenant X.

     Homme de dialogue, Louis Mirman n’a jamais fui la discussion, n’oubliant jamais de nous faire remarquer quand nous critiquions des séries que l’ensemble des éducateurs considéraient comme très faibles, « oui, mais les ouvrages que vous aimez sont ceux que je ne vends pas » – répondant avant la lettre par les arguments de l’économie de marché à toute action à vocation culturelle.

     Il nous arrive souvent de penser à lui quand nous essayons de parler d’exception culturelle en ces temps de mondialisation, mais il n’est pas certain que nous recevions le même accueil des maîtres actuels de l’information. Bourdieu, pour l’avoir tenté avec brio, ne fut pas plus heureux face aux maîtres es/communication.

     Mais peut-être le secret de Louis Mirman était-il ailleurs et nous fut-il révélé quand, en 1982, nous avons lu en manuscrit Silex Noir, puis, après, quand fut décerné le Grand Prix du Livre pour la Jeunesse du Ministère de la Jeunesse et des Sports, la même année. Le nom de l’auteur : Louis Mirman ! Nous avons, ce jour-là, discuté franchement de nos accrochages d’antan.

     Et ce n’est pas le moindre message que nous laisse, peut-être malgré lui, Louis Mirman, celui d’inviter tout ceux qui travaillent à la création culturelle de ne pas obéir aux contraintes et aux « lois du marché » et de poursuivre leur chemin contre toutes les entraves et toutes les innombrables formes de censure.

     Mon adieu n’est sans doute pas conformiste, mais je suis certain que Louis Mirman sourirait en le lisant …

( texte paru dans le n° 66 – octobre 1999 – du bulletin du CRILJ )

  silex noir

 Louis Mirman est né en 1916, de parents instituteurs. Licencié ès lettres, il enseigne l’anglais puis se tourne vers le journalisme d’agence et de radio. En 1947, il entre chez Hachette pour s’occuper de traduction puis de la Bibliothèque Verte et de la Bibliothèque Rose. En 1970, il devient directeur de l’ensemble du service Jeunesse-Collections, fonction qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 1979. Il se met alors à écrire : Le Silex Noir (1984), Young (1985), Grite parmi les loups (1987), A la recherche de Tiang (1990), quatre titres parus chez … Gallimard Jeunesse, en Folio Junior.