par Janine Despinette
La communauté internationale des artistes illustrateurs des cinq continents est en deuil. Stépan Zavrel est mort accidentellement à Sarmède, en plein chantier de ses fresques sur les facades des maisons de la cité du Vénéro, le 27 février 1999.
Pour la plupart des lecteurs du bulletin du CRILJ, le nom de Stépan Zavrel n’est sans douté lié qu’aux illustrations de Un rêve à Venise (Nathan), Le soleil disparu (Nord-Sud), Une pluie d’étoiles (Le Cerf), Le dernier arbre (Bohem Press et Bilboquet), La Cité des fleurs (Le Cerf), prix « Critique en herbe » de la Foire de Bologne en 1988.
Pourtant, nous pensons que ceux qui ont eu l’occasion de visiter Imaginaires des illustrateurs européens, exposition présentée en 1993 à la salle d’actualité de la Bibliothèque Publique d’Information du Centre Pompidou par Christiane Abbadie-Clerc et la Communauté de Sarmède dont Stépan Zavrel était le directeur artistique, comprendront que nous rendions hommage ici, même brièvement, au rôle essentiel qu’a joué, pour l’Europe, ce peintre poète praguois, émigré en Italie en 1959, et vers qui est venue toute une génération d’artistes et d’artisans d’images pour qui il fondera, avec Oscar Bozejvsky, Bohem Press, basé en Suisse. Mais pour qui il inventera aussi, dans des structures « à la jonction de l’école et du musée », une nouvelle esthétique de la communication, totalement pluriculturelle, capable de résister pour longtemps aux stéréotypes numériques en place et à venir.
Il était polyglotte, il savait tout faire, des marionnettes, des films et des livres. Il aimait la vie. Il savait dialoguer avec les enfants et inventer pour eux des mondes colorés fabuleusement beaux, mais il savait aussi regarder les images des autres et être à l’écoute de leurs projets, de les aider à découvrir leur vrai talent. A partir de Sarmède, il montait avec eux des expositions itinérantes, événements culturels aussi bien à Nex-York qu’à Tokyo ou à Paris, à Strasbourg qu’à Zagreb.
Au stand Bohem Press comme au stand de Sarmède Paese della Fiaba, cette année, à Bologne, le sentiment d’absence sera grand.
( texte paru dans le n° 64 – mars 1999 – du bulletin du CRILJ )
Né à Prague en 1932, Stépan Zavrel y fréquente la Faculté des arts cinématographiques et se spécialise dans le film d’animation. En 1959, il s’inscrit à la Faculté de Peinture de l’Académie des Beaux-Arts de Rome, et en 1963, s’établit à Munich où il approfondit ses études. De 1965 à 1968, il dirige à Londres la section du film animé du studio Richard Willims. S’établissant enfin à Rugolo, près de Trévise, il exerce son activité de peintre et d’illustrateur. En 1971, il fonde avec Otakar Bozejovsky la maison d’édition suisse Bohem Press. Son intérêt pour le monde de l’enfance et son attention constante aux jeunes illustrateurs l’incite à organiser de nombreuses expositions itinétantes d’illustrations d’originales. En 2001, s’est tenue à Sarmède (Italie), sous le titre Le monde magique de Stépan Zavrel, une exposition-hommage accompagnée d’un fort beau catalogue.